Autour de la caserne : La croix [et autres nouvelles] (1890) - Oscar Méténier.

De la même manière qu'il existe des "petits romantiques", il existe aussi des "petits" dans tous les mouvements littéraires. Oscar Méténier, lui, était un "petit naturaliste". Suiveur de Zola, il ne semble pas avoir fréquenté le maître, mais en revanche il était proche de Maupassant. Son emploi, secrétaire dans un commissariat parisien, lui a permis d'explorer les milieux populaires (Wikipédia parle même des "bas-fonds") de Paris, ce qui l'a aidé pour l'écriture de ses oeuvres, tant pour la description des moeurs que pour l'utilisation de l'argot. 

Méténier était connu également pour être le fondateur du théâtre du Grand-Guignol, qui devait lui permettre (difficilement) de jouer notamment quelques-unes de ses pièces refusées ; théâtre qui devait avoir un bel avenir comme on le sait.

Oscar Méténier était donc à la fois auteur dramatique et romancier.

Dans "Autour de la caserne", il nous raconte des histoires qui toutes ont pour personnages des militaires (simples soldats ou gradés) de la caserne de Vincennes dans les vingt dernières années du XIXe siècle. Des histoires que nous supposons en grande partie inventées, et dans la lignée de Maupassant. L'utilisation de l'argot est fréquente, le vocabulaire militaire est parfois technique et un peu pesant, mais dans l'ensemble c'est un plaisir de s'immerger dans l'armée française de l'époque le temps d'un recueil de nouvelles.

Dans "La reine des bois", des militaires souvent gradés sont chargés la nuit de surveiller la lisière du bois bordant la caserne. Ils en profitent pour se laisser rejoindre par une prostituée. Un jour c'est Cabot qui doit faire le guet mais au dernier moment on lui enlève ce "privilège" pour nommer à sa place un "bleu", un Breton très jeune et naïf. Cabot lui fait peur en le prévenant sur cette rencontre qu'il ne manquera pas de faire, celle avec la "reine des bois" comme ils l'appellent (page 137) :   

Le jeune Breton la rencontrera en effet et il ne sera pas déçu.

Dans "Première conquête", un fringuant militaire en déplacement avec sa garnison rencontre une serveuse d'auberge, ils se donnent rendez-vous à minuit, elle lui indique la chambre où elle couche (la numéro 4). A minuit, le militaire, pensant frapper doucement à la bonne porte, entend une grosse voix (celle du lieutenant qui avait sa chambre juste à côté de la 4) demander qui va là. Comprenant qu'il a fait une erreur, il s'approche de la chambre d'à côté dont la porte est entrouverte ; "elle m'attend", se dit-il, et il rentre dans la chambre sans frapper (pages 174-175) :     

Dans "La vertu de la commandante", une dame a la réputation d'être très vertueuse et fidèle à son militaire de mari depuis toujours. Mais elle explique que si cette fidélité est bien réelle, c'est parce qu'elle a été déçue par ses deux tentatives d'adultère. Dans la première, elle était tombée follement amoureuse d'un homme, un vrai, puissant et viril ; ils se sont retrouvés dans une chambre d'hôtel mais avant le passage à l'acte des gendarmes frappent bruyamment à la porte (pages 185-186) :    

Il s'avéra que c'était une erreur, les gendarmes s'étant trompés de couple... mais notre héroïne laissa tomber son partenaire, se disant que les hommes virils sont peut-être plus poltrons qu'on le croit. Elle décide de se tourner vers un jeune poète, sensible, mignon et à la conversation intéressante... mais hélas, au moment du passage à l'acte, le poète perd connaissance (pages 189-190) :

Voilà comment cette dame est finalement restée fidèle à son vieux mari.

Dans "Rallye-Paper", un vieux militaire célibataire endurci, passionné et exclusivement préoccupé par sa carrière et surtout son cheval Page, va finir par tomber amoureux d'une jeune femme pleine de qualités à ses yeux (pages 263-264) : 

Et en effet ces deux-là constitueront un couple assorti, partageant les mêmes passions, la même conception de la vie. Seul petit bémol, ils ne pratiquent pas la "chose", ce qui finira par manquer à la jeune femme et, malgré son amour envers son mari et à cause d'un pari très risqué, elle se donnera à un autre.

Autour de la caserne : La croix [et autres nouvelles] / par Oscar Méténier

Autour de la caserne : La croix [et autres nouvelles] / par Oscar Méténier -- 1890 -- livre

https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k68765n.texteImage