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Le gallicanaute des naines brunes et noires

Le gallicanaute des naines brunes et noires

(Cabinet de curiosités littéraires)


Mémoires d'un caniche (1866) - Mlle Julie Gouraud

Publié par Jérôme Nodenot sur 8 Février 2016, 11:18am

Catégories : #Insolites

Gallica me console de tout, même de la mort de mon chien Murphy (le 10 janvier 2016, à presque quinze ans... pas mal pour un boxer). Permets-moi, mon pépère, de te taquiner une dernière fois en te dédiant mon billet sur ces "Mémoires d'un caniche" ; tu n'étais pas raciste, le plus pacifique des toutous... et plutôt philosophe, comme le César dont il va être question ici. Tu feras toujours partie de notre vie, un peu désormais comme une sorte de mascotte.

Je craignais un peu, en ouvrant cet ouvrage, qu'il s'agisse d'un moyen détourné et humoristique pour faire un texte satirique (voire politique), un peu comme pour Aboitim (les pseudo-mémoires de Baltique, la chienne de François Mitterrand). Mais non, ce sont bien les mémoires d'un caniche. Légèrement anthropomorphisées tout de même.

Il faut lire ce livre pour plusieurs raisons, qui vont du simple amusement jusqu'à l'exposition de la condition animale de l'époque. C'est donc à la fois un ouvrage divertissant (j'aurais envie de dire : attachant, d'autant plus qu'il est, si j'en crois la dédicace, inspiré d'un épisode de la vie de l'auteure) et instructif. A lire aussi, tout simplement, si l'on aime les chiens.

César a été adopté par une famille, les Nelville, propriétaires du château de Baudry en Touraine. Il a aujourd'hui douze ans et écrit ses mémoires. Il faut dire que sa vie aura été mouvementée, et pour tout dire assez héroïque.

Il aura connu trois ou quatre familles d'adoption (après avoir été kidnappé et revendu par des voleurs dans le besoin), de la vie de château à la vie de château en passant par une période de grande pauvreté. Il portera différents noms : César, Fido, et Fidèle. Il n'aura jamais été battu. Rencontrera au cours de ses pérégrinations quelques-uns de ses congénères (Mouflar le chien de berger ; un chien errant à la patte cassée, etc.), et entendra parler d'autres chiens remarquables à travers les conversations de ses maîtres (des Saint-Bernard sauvant des humains qui veulent traverser les Alpes, le caniche savant Munito, etc.), ce qui est l'occasion pour le lecteur contemporain d'en apprendre beaucoup sur la condition canine au XIXème siècle. Un jour, par exemple, César aide à la capture (en servant d'appât) d'un tueur de chiens (il en a tué des dizaines) ; il dira à ce propos : "Le tueur de chiens fut condamné à trois mois de prison. Indulgence pitoyable !" (p101).

César, avec les Nelville, connaît une vie parfaite selon lui, c'est-à-dire en recevant beaucoup d'amour (en particulier de la part des enfants) ; en étant gâté mais juste ce qu'il faut, c'est-à-dire sans sombrer dans le côté "chien de salon" parfumé et pomponné comme une poupée ; en ne l'écartant pas trop, en somme, de sa nature et de son éducation maternelle, car, dit-il, "il n'est pas rare que les hommes contribuent à nous donner des défauts dont nous n'avons pas l'instinct" (p13).

César est un chien posé, tranquille, mais qui apprécie beaucoup les éloges. Lorsqu'un jour, après avoir sauvé sa petite maîtresse Henriette de la noyade, il passe dans le journal, il est plus que flatté, il en devient même assez orgueilleux.

Il est aussi un vrai chien qui n'aime pas les chats ; il nous explique même le danger qu'il y a pour un chien à fréquenter un chat : "Lui franc, généreux, sincère, peut-il s'entendre avec cette espèce dont la dissimulation, l'égoïsme et la perfidie sont connus du monde entier, sans perdre de la noblesse de son caractère ?" (p14).

César a une vie normale avec les Nelville : on l'assoit par amusement sur l'âne qu'est en train de monter Henriette, les enfants lui récitent leurs leçons, un jour il fait sa petite fugue comme tout le monde, ce qui lui permettra (après avoir rencontré Mouflar, un chien de berger) de comprendre que lui aussi à ses "brebis" à garder : une responsabilité, quoi. Sa vie alterne entre mission et petits plaisirs. Un belle vie en somme, remplie de sens et de joies.

Et puis un jour, à cause de l'imprudence de M. Nelville qui a oublié de le tenir en laisse à Paris, César est kidnappé par Delphine, une femme pauvre (avec mari et enfant) qui espère le revendre à bon prix. Ce qu'elle fait auprès d'un riche couple de jeunes mariés. César voyagera dans les Alpes. Il décrira même les jolis paysages, mais en précisant : "Si quelqu'un n'est pas de mon avis, il voudra bien se rappeler qu'en fait de paysage, je me sers des impressions des personnes et non des miennes" (p64). D'une manière générale, il a toujours soin d'ailleurs de le rappeler : "N'allez pas me croire savant sur mon récit. Je ne comprends pas un mot de ce que je vous dis, mais ma mémoire me sauve" (p78). A bon entendeur salut.

Après une nouvelle fugue, César sera récupéré par Brigitte, une mendiante attachante pour qui il aura beaucoup d'affection. Il l'aidera à se sortir un peu de la misère, en ayant le talent de se faire aimer par les habitants du village qu'elle habite qui du coup seront de plus en plus généreux avec elle.

Une chose tout de même qui a son importance : César peut avoir de l'affection pour d'autres personnes que ses premiers maîtres, mais ce n'est pas pareil. Il dira notamment : "Je regrettais peu mes derniers maîtres ; Baudry avait mon coeur tout entier. Cependant, j'ai conservé un sentiment de reconnaissance pour les jeunes époux. Ce sont eux qui m'ont arraché des mains coupables de Delphine" (p84). De même, après le décès de la mendiante Brigitte il part avec André, le fils de cette dernière, qu'il apprécie aussi beaucoup. Mais quand par hasard il retrouvera M. Nelville à Paris, il se jettera sur lui fou de joie. Il semblerait que pour les chiens ce soit, comme dit la chanson : "quand j'ai aimé une fois j'aime pour toujours".

Tous les chiens ont un peu les mêmes comportements, les mêmes jeux, la même façon d'aimer. Mais chacun s'individualise quand même, par son caractère, ou encore à travers quelques petites manies. César, par exemple, en empêchant gentiment, avec son museau, le docteur de prendre le pouls d'Henriette à chaque fois qu'elle est malade ; ou encore en mettant sa patte sur le bras d'une personne pour la remercier.

Le ton employé ici par l'auteur sonne juste, on est vraiment dans l'esprit de César, ou tout au moins l'illusion fonctionne la plupart du temps.

César, après une vie trépidante dont je me garderai bien de vous raconter toutes les péripéties, finira ses jours paisiblement. C'est Henriette qui, devenue adulte, terminera les Mémoires de César, après l'avoir veillé jusqu'à sa mort.

Julie Gouraud a écrit de nombreux livres pour la jeunesse.

Disponible au format epub.

Mémoires d'un caniche (1866) - Mlle Julie Gouraud
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H
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