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Le gallicanaute des naines brunes et noires

Le gallicanaute des naines brunes et noires

(Cabinet de curiosités littéraires)


Sans beauté (1862) - Zénaïde Fleuriot.

Publié par Jérôme Nodenot sur 20 Septembre 2021, 10:41am

Catégories : #Naines noires

Ce livre (que nous avons grâce à Gallica la possibilité de lire dans son édition originale de 1862), s'il est oublié aujourd'hui tout autant que son auteure, a connu un grand succès populaire et de nombreuses rééditions. Zénaïde Fleuriot était à l'époque aussi connue que, pour rester dans le même genre de littérature, la Comtesse de Ségur, sans que la postérité ait pu lui réserver le même destin. Pour en savoir plus sur Zénaïde Fleuriot, je vous invite à lire l'article de Roger Musnik sur le blog Gallica qui lui est consacré : https://gallica.bnf.fr/blog/20082019/zenaide-fleuriot-1829-1890?mode=desktop. Elle ne se maria jamais, fut préceptrice avant de devenir romancière, et habita une grande partie de sa vie dans le golfe du Morbihan ; comme la comtesse de Ségur elle fut très influencée dans ses livres pour "jeunes filles" par la religion catholique. Mais cette influence ne se retrouve dans "Sans beauté" qu'en filigrane, plus dans la morale que dans le discours religieux lui-même, ce qui enlève toute lourdeur au texte. Zénaïde plante des personnages un peu stéréotypés sans doute mais toujours pleins de vie et très attachants. Zénaïde Fleuriot a publié environ 80 romans et a vécu de sa plume, c'est tout dire. J'ai lu ce livre "pour jeunes filles", qui compte quand même 300 pages, avec un grand intérêt, et si la philosophie en est parfois surannée elle possède toujours un aspect rafraîchissant qui fait du bien au lecteur.

Gabrielle est orpheline de mère ; son père, M. Perceval, un homme très occupé, la confie à Tante Désirée. Chez elle, dans une maison champêtre, Gabrielle passe les quatre premières années de sa vie, très heureuse et aimée profondément. Mais son père, bien qu'il soit toujours très occupé, se remarie, et récupère Gabrielle puisque sa nouvelle épouse peut désormais l'élever. Cette nouvelle épouse est très belle et s'ennuie à la campagne, tandis que Gabrielle est très laide, et le principal jeu de la marâtre, tandis que le père vaque à ses occupations, sera de briller dans le "grand" monde et de tourmenter Gabrielle, la brider, la rabaisser. Finalement le courant ne passera pas entre elles et Gabrielle, assez vite, sera mise dans un couvent (où elle sera heureuse) jusqu'à sa majorité. Gabrielle doit épouser son cousin et ami d'enfance René, un homme de la campagne vigoureux, un peu sauvage mais avec un véritable bon fond ; hélas, Mme Perceval s'arrange pour que ce dernier tombe amoureux de la belle Sara, sa petite soeur, gentille mais totalement irresponsable. Finalement René, l'homme de la campagne, finira avec Sara à Paris, ruiné et malheureux, partira en Belgique pour fuir ses créanciers, laissant sa femme toute seule avec un bébé. Sara mourra de faiblesse après avoir confié son enfant à Gabrielle qui accepte de s'en occuper dans la maison champêtre de Tante Désirée. René revient, épouse Gabrielle (qui, fidèle aux préceptes de la morale sera toujours restée droite dans ses bottes et, malgré sa grande laideur, finalement sans doute la plus heureuse de tout ce petit monde). Tout est bien qui finit bien si l'on peut dire. Entre temps, Mme Perceval aura ruiné le père de Gabrielle (qui devient fou et mourra dans un asile) avant de se remarier avec un autre pigeon. Nous ne connaîtrons pas la fin de cette odieuse marâtre. 

Le thème de la laideur, très présent dans le livre mais sans tomber dans la lourdeur, est abordé dès les premières pages de manière presque caricaturale, un peu comme dans un conte (page 2) :  

Sans beauté (1862) - Zénaïde Fleuriot.

Les quatre premières années de Gabrielle ont été heureuses, on l'a dit, comme en témoigne cet extrait très bucolique (page 7) :

Sans beauté (1862) - Zénaïde Fleuriot.

Le contraste est saisissant avec ce que vit notre héroïne avec sa marâtre de belle-mère. Ici, par exemple, Gabrielle est enfermée dans sa chambre pour avoir fait je ne sais plus quelle bêtise ; pour s'occuper elle devient "amie" avec une espèce de cafard trouvé par hasard, la belle-mère rentre inopinément dans la chambre, Gabrielle tente de cacher son compagnon mais en vain (page 55) :

Sans beauté (1862) - Zénaïde Fleuriot.

Gabrielle va sombrer dans la haine, mais un beau jour elle découvre la foi et apprend à se résigner (page 87) : 

Sans beauté (1862) - Zénaïde Fleuriot.

Un extrait qui montre bien que les personnages dans "Sans beauté" ne sont pas des marionnettes mais bel et bien construits à travers une psychologie qui leur est propre, voire qui reflète parfois peut-être celle de l'auteure (page 228) : 

Sans beauté (1862) - Zénaïde Fleuriot.

Enfin, juste pour le plaisir, une bien vraie morale de fin (page 269) :

Sans beauté (1862) - Zénaïde Fleuriot.

De nombreux romans de Zénaïde Fleuriot sont à découvrir dans Gallica !

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