Chacun sa façon de laisser des traces, dans la vie ; Charles Rémard, lui, a écrit un poème en quatre chants et 200 pages sur l'art de c... (faire caca). Et il n'a pas si mal réussi, le bougre, puisque son ouvrage a été réédité pour la dernière fois en 1997, ce n'est pas si loin à l'heure où j'écris ces lignes. Qu'est-ce qui a pu pousser cet honorable bibliothécaire du château de Fontainebleau à démouler un tel ouvrage ? Il n'a pas publié grand-chose d'autre, un guide pour les voyageurs visitant Fontainebleau, deux ou trois poèmes et c'est à peu près tout. Rémard était-il scatophile ? Peut-être, certains passages pourraient le laisser croire ; mais il était aussi connaisseur des livres, et notamment de la notion de "curiosité littéraire", et d'autres passages du poème montrent qu'il voulait tenter de laisser derrière lui une oeuvre qui pourrait attirer l'oeil (à défaut du nez) des amateurs de vieux bouquins qui sortent de l'ordinaire. Je suis d'ailleurs tombé moi-même dans ses filets et, s'ils sont malodorants et peu goûteux je ne m'y suis pas ennuyé non plus.
Dès l'épître dédicatoire, nous entrons dans le vif du sujet :
L'importance du régime alimentaire, qui évite notamment d'être constipé comme cet homme (page 24) :
Une expérience qui démontre que le caca des femmes est bien plus gros et beau que celui des hommes (page 26) :
Alors qu'il a un rendez-vous galant, le poète surprend son amante en train de faire caca, ce qui est pour lui un vrai moment de grâce (page 27) :
Un vrai grand regret pour notre narrateur, Paris n'accepte pas que l'on fasse caca (ou même pipi !) dans ses magnifiques jardins (page 111) :
Conscient que son ouvrage ne sera pas un chef-d'oeuvre, ni un "classique", il nous révèle quand même ici une forme d'ambition, celle de rester en définitive comme auteur d'une curiosité littéraire, et sur point la postérité ne lui aura pas donné tout à fait tort (page 124) :